Quelqu'un tirait un édredon sur l'humanité

Le ciel était noir. Je ne m'en suis pas rendue compte de suite. Pourtant, les étoiles étaient nombreuses. A chaque retour au bled, je redécouvre cette pigmentation du ciel. Elle le font paraître plus grand et plus étroit, plus grandiose et plus amical.

Pas ce soir. Il était juste étrange. Car toute une moitié était colorée de noir-blanc-rose. Une teinte inimaginable. Je n'ai pas saisi immédiatement ce qui était « ciel » et ce qui était « nuage ». Lorsque la raison rend les armes, un moment, le monde devient merveilleux, en totalité. En quelques secondes, de fantastiques images se sont succédées dans mon esprit rêveur. (Cet instant fut splendide).

D'autres instants splendides, autour de la table. Avant le repas, pour des marathons-cuisine exécutés avec lenteur et calme. Pendant le repas, avec des étoiles dans les yeux – joie de l'acte mené à bien. Après le repas – amusement de la cuisine des restes.

Hier soir nous étions trois et avons :

découpé une salade feuille de chêne, concassé des amandes et émietté de la menthe sèche. Cela afin de mettre en dialogue le canard du nouvel an – cuit deux heures avant d'être couvert de sauce à l'orange; j'en reparlerais bientôt – et les mûres du réveillon.

Ces mûres là accompagnaient un foie gras de canard, selon une recette du futur livre du chef Kei Kobayashi (qui paraîtra aux éditions du Chêne le 2 avril). Je travaille sur ces pages, avec Chihiro Masui et le photographe Richard Haughton, et je détiens un vrai trésor. Toutes. les. recettes. Dont celle de ses mûres, marinées au vin rouge et relevées de sucre, d'Amaretto et de mirin (je n'ai jamais eu de vinaigre de Xérès).
Et puis juste un peu de sel, un filet d'huile d'olive et – indispensable – un tour de moulin à poivre.
Avec cela? Le fond d'une bouteille d'Aloxe-corton. "1990" disait l'étiquette.