Un effritement et son contraire
Il m'arrive d'avoir la sensation de me déconstruire.
Comme si ma cohérence s'effritait et que, le processus allant s'accélérant, ma personnalité s'éparpillait comme un ensemble de billes à l'origine compact se séparant en une galaxie d'éléments épars. Et au lieu de me concentrer sur moi-même, de me recentrer et de refaire un, je m'agite en tout sens, telle un pantin désarticule, pour rattraper les éléments fuyants.
Je sais quelles sont les situations qui provoquent cette sensation et si je tente de les fuir, je ne peux y échapper complètement.
Alors j'attends et je tente de rester moi. Parce que cette sensation (éminemment désagréable) fait lien avec une vieille peur. La peur de changer totalement, d'être, d'ici quelques années, une autre qui rira du moi-maintenant. La peur de mourir, en fait, sans que personne ne s'en rende compte.
J'avais créé un personnage ainsi. Il se nommait L et n'était pas humain.
L est un flux d'informations et de capacités agrégés en un substrat de personne. Mais L n'a aucune personnalité car il n'est que potentialités et se construit uniquement par reflet et réflexion des données et personnalités qui lui seront présentées.
La plupart des humains pensent que ainsi L et les siens se construisent ainsi en copiant la personnalité des demi-pilotes, de leur moitié humaine. Mathisse et les autres humains qui servent ainsi de miroir à L et ses pairs savent que cela est faux. Ils ne développent jamais de personnalité cohérente telle qu'un humain l'entendrait et le principe de « je » leur reste étranger. Ils n'utilisent le « je » que parce que le langage ne permet pas de faire autrement, quoique qu'échanger avec le « il » ou le « nous » ne les gêne aucunement.
Car tout ce qui révèle de l'esprit humain peut se transformer en flux informatique, en données se croisant et s'agrégeant mais le processus est lent et compliqué.
Ainsi L n'a jamais compris certaines sensations et certaines humeurs de Mathisse. Il ne comprend ni le regret ni la mélancolie ni le mal du pays.
Mais très vite il a su mémoriser et traduire la solitude et la terreur.
Car là où L est différent c'est qu'il ressent la solitude, en tant que noir complet, privation d'informations et de sens, dés lors que Mathisse ne lui apporte plus son interface de chair. Et dés qu'il est dans ce noir absolu, ce vide qui ne contient même plus la notion de vide, trop humaine, L se déconstruit. Et cela induit une grande terreur.
Une des solutions pour redevenir soi c'est de se prouver que l'on a pas changé.
Que l'on aime toujours autant écouter La librairie francophone et Ça peut pas faire de mal sur Inter. Que de voir farine et eau s'agglomérer et former une entité plus existante et présente que l'un ou l'autre reste magique.
Et qu'une focaccia, le soir, avec une salade de tomates, fait se sentir en été.
Il y a autant de recettes de focaccia que d'individus en faisant, je vous livre la mienne telle que mise en œuvre ce soir-là, avec juste du sel, des herbe set de l'huile. (Mais avec des tomates, ou des olives ou ce que vous voulez, cela reste fort bon! Quoique je préfère pour cela une base et une forme de fougasse provençale)
Pou une grande focaccia ou 5 petites, pour trois gourmands.
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230g de farine
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10g de levure tiède
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1 càc sucre
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100 ml d'eau tiède
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herbes de provence (romarin pour moi)
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1 à 2 càs d'huile d'olive et plus pour arroser (moi je n'en mets qu'une et après j'arrose généreusement)
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fleur de sel
Avec de nombreuses variantes
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Mêlez la farine, le sucre et le sel dans un grand saladier.
Creusez un puits et ajoutez y l'eau et la levure, ainsi que l'huile.
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Mélez les ingrédients à la cuillère jusqu'à ce que la masse prenne forme puis pétrissez avec volonté et témérité avec plant de travail et mains farinés mais pas trop (sinon ça assèche la pâte) pendant 10 bonnes minutes! Le but étant d'avoir une pâte lisse, souple et élastique.
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Laissez reposez tranquillement la chose, couverte, au tiède, pendant 45 min à 1H: elle doit doubler de volume, ou presque (Vous prenez pas le chou si c'est pas le cas)
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Puis vous avez le choix: soit vous la séparez soit vous la laissez entière.
Soit vous l'étalez sur une plaque avec du papier cuisson, soit dans un plat huilé (mais l'étalez à la main est toujours mieux.)
Soit vous la laissez reposer, soit pas! Moi je la laisse généralement à nouveau 45 min à H car je l'aime moelleuse et épaisse!
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Préchauffez votre four à 230°C.
Creusez des trous dans la pâte avec votre index, saupoudrez de fleur de sel, d'herbes et arrosez généreusement d'huile d'olive (de bonne qualité, pour le coup).
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Enfournez pour environ 20 minutes: elles doit avoir doucement doré mais sans brûnir. Attendez qu'elle tiédisse et absorbe toute l'huile restant avant de la couper en carrés à partager.
Généralement cela se dévore voracement. (Mais libre à vous de ne pas suivre notre exemple!)